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Le francoprovençal est une belle langue. Bien que ne la parlant pas , ne la comprenant pas, je reste sensible à sa musicalité lorsque les -trop rares- occasions de l'entendre se présentent. Cette langue, vulgairement surnommée patois, parlée par mes grand-parents, m'a bercée durant mon enfance. C'est pourquoi j'ai envie de la mettre à l'honneur sur ce blog. Je mettrais en ligne petit à petit les textes qu'écrivit mon grand-père Donat et que vous connaissez déjà pour les avoir lu en français.
Histoires maintes fois racontées et publiées dans la Revue Dava Rossan-na en français et en patois sous le nom d'auteur Dona Revène – Le Marmotïn – Moulïn - Péjèy

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samedi 7 avril 2012

Histoire familiale


En ce temps là, la vie était rude et les gens étaient relativement pauvres. Dans la vallée de la « Grande Eau », le torrent dénommé le Ponturin actuellement, nos ancêtres vivaient en autarcie. Chaque foyer possédait quelques animaux (une, voire rarement deux vaches), cultivait une parcelle de terre en céréales telles que avoine, orge, et principalement seigle, dont il apportait la production au moulin pour la transformer en farine, puis ensuite en pain. De ses bêtes, la famille, souvent nombreuse, tirait les produits tels que lait, beurre, fromage ; nécessaires à leur survie. De petits lopins cultivés, elle obtenait pommes de terre ,et surtout fèves, qui constituaient la nourriture de base. Les prairies à foin étaient entretenues avec grand soin, même qu'elles étaient très éparpillées, au plat mais surtout dans les pentes. Les pâturages familiaux étaient particulièrement très précieux. Les herbages dits « communaux » étaient utilisés avec parcimonie. Les habitants de notre vallée de Peisey étaient nombreux. La bête de somme, le mulet était un bien pratiquement inaccessible. Etant donné la pauvreté des gens, tous les travaux des champs se faisaient manuellement et dans des conditions très pénibles. La pauvreté qui sévissait et obligeait parfois à trouver sa subsistance plus loin que la vallée natale.
Voilà la raison de ce texte en introduction, et qui justifira le récit qui suit sur la famille SILVIN.

SILVIN Jean-Baptiste (1829-1896) et
Marie-Antoinette (1840-1889) née POCCARD-GABRIELLO

Maurice SILVIN (1806-1862) et son épouse Marie-Catherine (1806-1880), née POCCARD, se sont mariés en 1828. Ils mirent au monde sept enfants, dont Jean-Baptiste, duquel nous apportons les informations que nous connaissons et qui nous ont été transmises de génération en génération, jusqu'à nos jours.

C'est la période de la fenaison, en juillet-août de l'année 1850 ou 1851. La famille SILVIN possédait des prairies de fauche au lieudit « les Loyes », au-dessus de Beaupraz. Jean-Baptiste, l'aîné, s'était rendu à l'aube avec son père, pour en faucher le fourrage ; à la faux biensûr. A l'heure de la collation, le père Maurice sortit de son « télin » (sa veste) et pour unique nourriture, trois pommes de terre cuites pour chacun d'eux. Lassé de cette misère, le jeune homme dit à son père : « Papa, i fé pomi ! » (Papa, ça ne fait plus !). Et de retour au bercail, il prépara son baluchon, salua sa pauvre mère et le siens et s'éloigna pour une destination inconnue. Il a certainent dû marcher pendant de nombreux jours et ce que nous savons, c'est qu'il atteignit la ville de Sète. Heureusement en ce temps là, l'hospitalité était une règle morale observée que l'on devait au voyageur. Il dût certainement en bénéficier. Cependant, saluons la détermination et le courage développé pour sa survivance.

A Sète, principal port de commerce sur la Méditérranée, aux échanges importants avec l'Afrique du Nord, Jean-Baptiste devint cireur de chaussures. Grâce au climat agréable, ce lieu d'éxistence lui permettait de dormir à même le sol. Après beaucoup de persévérance, il put un jour remonter sur Paris, où il rejoingnit d'autres Peiserots, qui étroitement solidaires, l'accueillirent dans leur clan spécialisé dans la fabrication d'objet en bronze d'art. Il vécut professionnellement la plupart de son temps à Paris, quartier des bronziers, jusqu'à ce qu'il eut amassé suffisamment d'argent pour revenir au pays. Il réhaussat la maison de famille d'un étage, en 1878, au village de Moulins, près de la chapelle Ste Agathe. A ce moment là, il avait 49 ans. Lui et Marie-Antoinette purent vivre de leur rentes, car l'argent ne dévaluait pas. Marie-Antoinette ne put apprécier le confort de sa demeure rénovée seulement onze ans. Elle décéda en 1889, elle n'avait que 49 ans. Jean-Baptiste vécut encore sept ans veuf et ateignit l'âge de 67 ans seulement.

A savoir que Jean-Baptiste épousa Marie-Antoinette en 1860 ( lorsque la Savoie devint française). Il avait 31 ans, elle, onze années de moins. Jean-Baptiste patienta longtemps avant de fonder une famille, soucieux d'assurer un sort meilleur à sa descendance. Marie-Antoinette mit au monde un premier fils qu'elle prénomma Jean-Baptiste, comme son époux. Mais le bébé ne survécut que très peu de temps. La seconde naissance fut celle de Maurice, un fils très caractériel, qui posa de gros problème à ses parents et s'éloigna d'eux à sa majorité, après avoir réclamé sa part en numéraire. Maurice a dû naître peut-être vers 1872. La seule fille issue de leur union fut Marie-Hortense (1877-1883) qui ne vécut que six années. Entre Maurice et Marie-Hortense, naquit un fils en 1875. Il fut prénommé Emile.

Emile, né le 27 avril 1875, épousa en 1899 Victoire Virginie Trésallet (née en 1880, plus jeune que lui de cinq ans, qui avait donc 19 ans). Ils n'eurent pas d'enfants dans l'immédiat. Puis survint la Guerre de 1914-1918 et Emile fut appelé sous les drapeaux et combatit sur le front. Il fut fait prisonnier en Allemagne, eut l'aubaine d'être affecté dans une ferme. La personne qui s'occupait de la ferme avait son époux au front et souffrait de son absence. Elle fut très gentille à son égard et Emile fut une aide appréciable pour la seconder aux travaux des champs. Après l'armistice du 11 novembre 1918, mais seulement au printemps 1919, les prisonniers français furent rendus à leur patrie. Emile fut enfin de retour au pays. Vingt ans s'étaient écoulés depuis leurs mariage. Victoire avait 40 ans et Emile 45. Un fils naquit de leur Union : Donat, (qui fut leur seul enfant) né le 10 octobre 1920. Victoire Virginie décéda le 12 mars 1926 à l'âge de 46 ans et Emile 22 ans après, le 19 mars 1948, à l'âge de 73 ans. Par la suite, les enfants de Donat appelèrent leur grand-mère Victoire « Mémé du Ciel ». Donat se souvient à peine de sa maman car elle mourut à l'Hôpital d'Alberville.

Après le décès de Victoire, Emile resta seul avec son fils à Moulins, de 1926 à 1928 et Donat fréquenta l'école primaire de Peisey, de l'âge de 7 ans à 8 ans. Emile retrouva une compagne qui s'appelait également Victoire, originaire de Peisey, mais vivant à Fontenay-sous-Bois et résidant l'été à Nancroix. Le couple et le petit Donat allèrent vivre ensemble à Fontenay. Donat alla à l'école primaire de 8 à 10 ans. Alors s'établit entre les deux adultes un différent : la dame Victoire voulait garder l'enfant et renvoyer son compagnon. De ce fait, Emile et Donat revinrent à Peisey.

SILVIN Maurice Donat Cyprien
communément appelé Donat (10 octobre 1920-1er février 2007)

A leur retour, le garçonnet reprit sa scolarité au village, de 11 à 12 ans. Il obtint son Certificat d'Etudes Primaires en juin 1932 : âgé de 12 ans et demi à peine. Elève brillant, Donat attira l'attention du groupe de prêtres originaires de Peisey, qui assurèrent le financement de ses études à l'Institution Secondaire Libre de St Paul-sur-Isère près de Cevins (Savoie). Ses études en Internat s'étalèrent de l'Automne 1932 à juin 1939, de la classe de sixième à la Terminale. En particulier, il étudia le latin, le grec et l'italien. St Paul était un Petit séminaire, préparant une élite à la prêtrise. Il dût interrompre ses études, alors qu'il abordait le niveau du diaconat, pour cause de surmenage cérébral. Il revint au villge en 1939 et sa santé se rétablit progressivement sur une durée de l'ordre de huit années. (Son fils aîné Pascal se souvient que son père ne put reprendre la lecture de journaux ou de livres que vers l'âge de 30 ans). L'année 1940 le vit s'éprendre de Marcelline Augusta TRESALLET, 21 ans, du village du Villaret. Il l'a connut à la montagnette des Rêches, étape de pâture du troupeau, et l'épousa le 16 avril 1941. Il avait 20 ans et demi. La majorité à l'époque était de 21 ans ; ce qui nécessita l'accord de son père Emile pour son mariage. Marcelline, quant à elle, avait presque 22 ans.
Edouard Silvin, Peisey-Nancroix (Savoie), 2011©



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